Assises de la Marne / Bavure chez les dealers d’Epernay : des peines modérées

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Journal l’Union – Publié le vendredi 26 septembre 2008
Pendant deux jours, sur le banc des victimes, Mickaël Taymont, un ouvrier vigneron de 32 ans, a revécu le cauchemar de la nuit du 24 septembre 2003. Il dormait tranquillement dans sa maison d’Orbais-l’Abbaye, quand des inconnus ont sonné à sa porte. « Recep Delikaya m’a demandé si je m’appelais bien Taymont. Ça a duré deux secondes », dit-il, rattrapé par l’émotion. Il a suffi qu’il réponde oui pour se retrouver nez à nez avec un fusil à canons sciés. Dans la panique, il est parvenu à fermer la portem mais Mustapha Yusufoglu a eu le temps de faire feu à deux reprises. La victime s’en sort sans une égratignure. Son seul tort : être l’ex-petit ami de Marie-Line Thiercelin, accusée par les deux agresseurs de les avoir arnaqués.

Mickaël Taymont, pris pour cible par erreur.

Mickaël Taymont, la victime, ici avec son avocat, Me Derowski.

La cour d’assises a pu découvrir depuis mercredi le monde sans foi ni loi des trafiquants de drogue de Bernon, le quartier HLM d’Epernay. Yusufoglu et Délikaya avaient investi 3<500 € dans le commerce de la poudre. Ne voyant rien revenir, les accusés avaient monté une expédition punitive contre les proches de leur importatrice, introuvable. Et pour cause. Elle était derrière les barreaux. Hier soir, la cour et les jurés n’ont pas retenu la tentative d’assassinat. Comme l’avait demandé la défense, ils ont reconnu coupable Yusufoglu de violences volontaires avec armes et l’ont condamné à 4 ans et demi de prison. Même peine pour Delikaya.
Mamadou Sakho, spectateur passif des faits, écope de deux ans dont un an ferme. Un autre prévenu, qui avait servi de chauffeur, est acquitté, au soulagement de Me Focachon, son avocate..
Tentative d’assassinat ou violences avec arme ? Deux jours de débats ont fait pencher la balance vers la seconde hypothèse. La mesure de rétorsion pour impressionner les proches de Marie-Line Thiercelin a dérapé. La faute à Mustapha Yusofuglu, « le cerveau » de la bande, un surdoué des échecs (il a participé au championnat de France) qui a gâché son talent. « À l’époque, il a 19 ans. C’est le petit caïd qui monte », souligne Jean-François Kuhn, l’avocat général. « Un homme calculateur, froid, avec ce sourire décalé, inquiétant, provocateur » contre lequel le magistrat requiert onze années de réclusion criminelle.
Au sujet de Recep Delikaya, le fidèle lieutenant, l’accusation demande huit ans d’emprisonnement. Les deux autres complices ont eu la faible d’accompagner leurs copains. « Au mauvais endroit au mauvais moment », selon Sakho, contre qui sont réclamés deux ans et demi ferme. A l’encontre du chauffeur, complètement réinséré depuis les faits, l’accusation requiert 5 ans d’emprisonnement dont 3 avec sursis. Mais ni l’accusation, n i l’expert en ballistique, ni la partie civile ne sont parvenus à démontrer une réeele intention de tuer.
Mes Benkoussa, Barbe et Pechard se sont engouffrés dans la brêche et ont combattu avec conviction la thèse d’un meurtre préparé. Peu aidés par Yusufoglu et Delikaya, actuellement détenus dans deux autres affaires criminelles, ils ont fini par emporter la conviction des jurés.
Christophe Perrin

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